C’est l’été. Paris se vide de ses habitants et se transforme en une ville parallèle, pleine de terrasses de café où l’on s’extasie en anglais sur un sandwich jambon-beurre ou sur un verre de vin très médiocre. On croise des jeunes filles qui semblent peu farouches, aux cheveux multicolores et en minishorts mais qui s’avèrent aussi inaccessibles que si elles évoluaient dans un rêve.
Les commerces ferment. Les galeries aussi. En cette année de Jeux Olympiques, la police est déployée partout et en permanence, dans l’attente fébrile de hordes d’amateurs de stades dont on pressent qu’elles pourraient tout dévaster comme un nuage de sauterelles géantes abreuvées de bière et d’esprit de compétition. Je déteste le sport. Ce nouvel opium du peuple détourne l’attention du beau et de l’essentiel. Il entretient nos plus bas instincts en exacerbant le sentiment de supériorité des uns sur les autres. Et voir des sportifs exhiber leurs muscles et leurs jambes poilues ne m’a jamais émoustillé le moins du monde.
Je décide de plonger dans un bain de fraicheur et d’incorrection et me dirige vers la galerie Napoléon, 2 rue d’Argenteuil à Paris où sont exposées des planches originales de Vuillemin, mais je trouve portes closes. Je m’achemine alors à deux pas de là, vers l’Atelier des Artistes en Exil, au 6 rue d’Aboukir où a lieu « l’Eté culturel », avec des concerts et des performances de nationalités différentes tous les jours jusqu’à la fin du mois de juillet, mais j’arrive trop tôt. La scène est encore en préparation. Et, de plus, il n’y a aucune œuvre exposée.
Il fait beau. Je poursuis ma promenade jusqu’à l’espace éphémère Kiff & Marais, au 17 rue des Gravilliers à Paris, qui propose de nouvelles expositions collectives, chaque semaine, jusqu’à la fin du mois d’août. C’est soir de vernissage. Je connais la moitié des gens qui sont là. Il y a au fond de magnifiques photos en noir et blanc de Patrick Causse. Il y a également des peintures et des sculptures. Je retrouve mon ami Rodney Prosser qui y présente quelques-unes de ses toiles.
Photo Arnaud-Louis Chevallier
Rodney propose une œuvre colorée, influencée à la fois par l’Art Naïf et l’Expressionnisme, et ancrée dans un quotidien heureux. Il est également artiste-vidéaste et réalise des images hypnotiques qui s’enchainent dans des univers chaleureux et flamboyants. Il m’explique que sa participation à l’exposition s’est décidée il y a seulement une dizaine de jours, mais je constate que ses tableaux présentent une belle unité et qu’ils s’insèrent parfaitement à l’ensemble de ce qui est aux murs.
Je m’arrête sur sa toile intitulée « Woman at a party ». Elle représente une femme bleue, nue, de dos, qui évolue au milieu des ombres floues d’une foule de fin de soirée. Ce doit être l’une des touristes inaccessibles, dans une fête imaginaire et idéale où, forcément, il se passe quelque chose de sexuel à la fin. Trois bandes rouges recouvrent partiellement sa fesse droite. J’y vois une allégorie comme pour représenter une fessée érotique qu’elle viendrait de recevoir, à moins qu’il ne s’agisse de la représentation de la chaleur de son corps incandescent. Hélas, elle reste obstinément muette, le dos tourné, et ne me donne aucune explication.
Photo Arnaud-Louis Chevallier
Le vernissage se termine par deux mini-concerts : un, assez cosy, de Jonathan Velasquez et un, beaucoup plus rock (et excellent), de Sean Magyar.
Espace éphémère Kiff et Marais, 17 rue des Gravilliers, 75003 Paris
expositions nouvelles chaque semaine jusqu’au 23 août 2024.
Atelier des Artistes en Exil, 6 rue d’Aboukir, 75002 Paris
« Été culturel 2024 » jusqu’au 25 juillet 2024.
Galerie Napoléon, 2 rue d’Argenteuil, 75001 Paris
Rétrospective Vuillemin jusqu’à septembre 2024.